L'espace des villes
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(Eveline Courbin)
Mon ami Antoine Giménez d'Arzew, vous ai-je déjà parlé de lui? Un très bon ami mais aussi un chasseur invétéré, tout comme Michalet. La chasse, sa vie! Il serait resté tout le temps dans les forêts à traquer le sanglier. Un champion du caldéro et de la paella aussi. Il faisait partie intégrante de toutes les fêtes. Tout le monde le cherchait, tout le monde le voulait. Une grande figure arzewienne. Nous chassions beaucoup ensemble aussi.
Un soir, nous organisions un affût aux sangliers dans la région de Frenda, avec lui, Julot et d'autres amis. Nous nous postions, la nuit tombait. Pas un brin de vent. Le silence absolu. Soudain, deux coups de feu retentissaient. Tiens, pensais-je, c'est Tonio qui vient de tirer. Il a dû le tuer parce que je n'entends plus rien. Un bon moment plus tard, alors que nous n'entendions pas de bruit de sanglier s'aventurant vers nous, nous nous décidions Julot et moi à aller voir Gimenez.
- "Qu'est ce que tu as tiré, Tonio?"
- "Un gros sanglier, là, dans la clairière. Il était en train de manger tranquillement, il ne m'a pas entendu venir. Je n'ai pas fait de bruit. Il est très gros. Ce doit être un "chiti" (gros sanglier mâle avec de grosses défenses). Il est mort. Il ne bouge pas. Je l'ai laissé net sur place."
Lampes allumées, nous nous dirigions tous les trois en direction du sanglier.
- "Il est drôle, ce sanglier, disait Julot, il a de grandes oreilles..."
Oh, surprise!... en fait de sanglier, Gimenez venait de tuer un âne. Le très beau bourricot de la "khaïma" d'à côté. Ah! Ah! fou-rire général. Nous étions pliés tous les trois. Morts de rire. L'arabe du coin, à qui appartenait le bourricot, riait beaucoup moins, lui. On payait le bourricot bien sûr et pendant des jours, des mois et des années on continuait à rire de cette péripétie. Tonio, lui, riait aussi. Les nouvelles de ce genre se diffusaient très vite et chaque fois que l'un de nous partait en voyage et trouvait une carte postale avec un beau bourricot dessus, il l'envoyait à Gimenez. Il en avait toute une collection, le pauvre...
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